vendredi 22 août 2008

Bernard Chabat La Tendresse Informatique

Ah bonjour bernard chabat, dis-donc, qu'est-ce que ton look est superbe! je t'ai appelé parce que j'ai encore un problème d'ordinateur qui bug ... bonjour, et bah ca tombe bien, on est la pour ça ! ... ah, mais en fait peut-être aussi que je t'ai fait venir pour te parler d'un secret caché au fond de mon coeur ... ouais, bah je comprend bien ton souci, et bah on va tâcher de régler le problème . bon! alors qu'est-ce que c'est encore que ce merdier ? qu'est-ce qu'ils m'ont foutu comme bordel encore dans cette saloperie de becane ?



Le sujet déchaîne les passions. Le cinéma s'en empare régulièrement, preuve s'il en est qu'il s'agit d'un sujet "croustillant". Souvenez-vous… Il y a eu la folie meurtrière de Tom Sanders (Michael Douglas) et Meredith Johnson (Demi Moore) dans Harcèlement (1995), les péripéties domestico-professionnelles de Lynette (Felicity Huffman) et de son Tom de mari (Doug Savant) dans Desperate Housewifes et le tragico-burlesque de Bridget (Renée Zellweger) et Daniel Cleaver alias Hugh Grant dans Bridget Jones…

1 personne sur 2 déclare un amour au bureau

Une enquête menée en 2005 par le site de recherche d'emploi Monster auprès de 36 950 Européens, révèle que près d’une personne sur deux prétend avoir déjà eu une relation amoureuse avec un(e) collègue.

La loi de Cupidon

Loïck Roche, psychanalyste et éminent spécialiste en burologie, estime qu'environ 12 % des couples français se rencontrent sur leur lieu de travail…D'ailleurs, il établit une nouvelle loi (la loi de Cupidon) dans son livre Cupidon au travail : "Chaque homme et chaque femme, en fonction de son ancienneté et du nombre de personnes que compte son environnement professionnel, va développer un nombre précis de relations intimes sur son lieu de travail".

L'amour au bureau est un sujet pour magazines féminins. Il aurait pourtant sa place dans les séminaires de formation au management... Parce que les occasions de rencontre y sont nombreuses, l'entreprise est en effet le lieu par excellence où Cupidon est en embuscade. A en croire Loïck Roche, docteur en psychologie et en philosophie et directeur adjoint de Grenoble Ecole de management, la probabilité de faire une rencontre sur le lieu de travail est même statistiquement beaucoup plus importante que n'importe où ailleurs. Il a même mis cette probabilité en équation dans son livre, dont voici quelques extraits :

Les entreprises, sociétés, administrations et collectivités, sous couvert de vouloir le bien des hommes et des femmes qui travaillent pour elles, organisent volontairement la confusion entre vie privée et vie professionnelle. [...]

« Dans un livre écrit avec Dominique Michalon, L'Entreprise sans la psychologie (Maxima- Laurent du Mesnil Editeur, 1997), je mettais en garde les managers qui veulent à tout prix créer des relations affectives avec les hommes et les femmes de leurs équipes pour ensuite, même s'ils s'en défendent, manager par l'affectif. Cet ouvrage était né du constat que j'avais pu faire dans les différentes entreprises et industries où j'intervenais alors, où j'avais été témoin des dégâts que le management par l'affectif pouvait créer. Car, si l'affectif peut être un élément facilitant lorsque tout va bien [...], il est clair qu'en cas de conflit il n'y a plus de possibilité d'arbitrer, de décider, voire de sanctionner avec la sérénité que requiert pourtant ce type de situation. Pour vous en convaincre, imaginez que vous deviez sanctionner un collaborateur qui a fait une faute lourde et qui, dans le même temps, se trouve être votre meilleur ami. Vous comprenez et mesurez tout de suite la complexité de la situation dans laquelle vous seriez pris

« Naturellement, il ne s'agit pas ici de dire qu'il ne faut pas nouer des relations d'amitié sur le lieu de travail (et je ne parle pas là des relations intimes sinon sexuelles), car certaines relations vont naître naturellement. Ce que je dis, c'est qu'il ne faut pas vouloir créer (qui plus est de façon artificielle) de l'affectif en pensant que ce sera plus facile de diriger. Bien au contraire ! S'il n'y avait qu'une règle à retenir dans le domaine du management, ce serait celle-ci : il faut essayer de travailler avec les hommes et les femmes pour ce qu'ils font et non pour ce qu'ils sont. Cette règle ne va pas de soi. Il existe ainsi toute une littérature qui vante ce que j'ai appelé le management par l'affectif.

« Il me semble pourtant que l'application de cette règle est précisément ce qui va permettre à l'entreprise de progresser. En acceptant de travailler avec les autres pour ce qu'ils font et non pour ce qu'ils sont, il y a de la place pour la critique (au sens le plus positif) des idées et des arguments des uns ou des autres. [...] »

Disponibilité illimitée

« Dans leur désir de bien faire, les entreprises qui en ont les moyens proposent aujourd'hui à leurs employés des services de plus en plus nombreux. Cela va de la crèche au pressing, en passant par le salon de relaxation, les courses livrées directement dans le coffre de leur véhicule. Si je ne conteste pas que cela puisse rendre service, il ne faut pas perdre de vue que, poussés à l'excès, ces procédés participent aussi à l'organisation effective de la confusion entre vie professionnelle et vie privée ; et, à terme, à la mise en danger des personnes. En effet, il me semble que rendre les personnes disponibles, peut-être plus que de raison, pour leur employeur, peut conduire, sans aller jusqu'à parler de "déresponsabilisation", à les mettre en danger. Parce que celles-ci, qui plus est, donnent à voir leurs difficultés éventuelles avec leurs enfants, leurs goûts et dépenses (choix et montant)..., voire, et sans jeu de mots, leur linge sale ; un linge sale qui n'est plus désormais lavé en famille mais, comme c'est parfois le cas aujourd'hui, sur le lieu de travail. »

Dangereux séminaires

« [...] Plus insidieux, l'entreprise favorise le développement de relations informelles et extraprofessionnelles sur le lieu de travail : multiplication des pots, à l'occasion d'un anniversaire, d'un événement, d'une réussite, d'un départ ou d'une arrivée, soirées, séminaires résidentiels avec plages de détente [...] dans un cadre en général plutôt agréable : il peut se situer à la montagne, ou, ce qui me paraît beaucoup plus discutable bien qu'extrêmement séduisant, dans une île de l'océan Indien, comme ces journées organisées par un célèbre fabricant de lunettes.

« Là où il y a action et prise en otage, du moins confiscation, d'une part de la vie privée, c'est lorsque cela prend sur un temps qui ne devrait pas être consacré au travail ; un temps qui met en présence des hommes et des femmes dégagés de tous les problèmes du quotidien (les enfants, les relations avec les beaux-parents, les difficultés de voisinage, les traites à payer, le ménage à faire...) et, même, dégagés de leur conjoint(e). C'est là que nous comprenons mieux pourquoi le lieu de travail (et ses différents éclatements, notamment ludiques) permet de maximiser le nombre de rencontres, comme nous pouvons le voir avec le principe de la énième
Réunions tardives

« J'ai pu observer de nombreux exemples absolument édifiants de confiscation de la vie privée des salariés par un manager, comme ce dirigeant qui multipliait les séminaires avec nuit à l'extérieur dans un site où, curieusement, il y avait toujours un problème de chambre (la ficelle était pourtant énorme : il en manquait toujours une ou deux...). Mais je retiens plus particulièrement la manière dont fonctionnait l'un des directeurs du siège d'une grande banque française. Il avait pris l'habitude d'organiser, tard dans la soirée, voire durant une partie de la nuit, des réunions avec, à chaque fois, des collaboratrices invitées en fonction de critères connus de lui seul. Il était clair que l'urgence de la réunion n'était absolument pas établie.

« On avait affaire non seulement à l'organisation de la confusion entre la vie personnelle et la vie professionnelle, mais bien à une véritable prise en otage de la vie privée, et ce, d'autant plus que ce directeur prenait un malin plaisir à ne prévenir ses collaboratrices que le jour même où avait lieu ladite réunion. »

UNE VIE PRIVÉE... de vie privée

« Il faut alors parler, pour ces cas précis, de l'envers du décor qu'un tel comportement peut générer : à savoir la violence faite aux conjoints des collaboratrices qui, eux, sont à la maison et attendent (comme d'ailleurs à la conjointe du directeur dont il est fait mention). La confiscation de la vie privée, c'est aussi cela : une vie momentanément privée... de vie privée. Une attente lourde et difficile parce que sans nouvelles. D'ailleurs, il n'est pas question d'appeler sur le portable ; non seulement on ne saurait déranger sa femme dans une réunion qui doit être très importante, mais ce directeur qui pensait décidément à tout avait même été jusqu'à demander instamment que l'on éteigne les portables avant d'entrer en réunion. Autant dire, et pas seulement parce que l'imagination fonctionne également mieux la nuit, que celle-ci tendait à égarer les pauvres conjoints qui, invariablement, finissaient par penser qu'ils devaient bien s'amuser "là-bas".

« S'il vous est arrivé de vivre, une nuit, une situation comparable, vous savez combien cela est violent. Car le pire vous attend. Le pire, c'est quand votre conjointe est de retour et que vous vous pensez autorisé, à la vue de l'heure, à faire une remarque. Très vite, le ton monte. Les griefs se multiplient au point que votre conjointe peut en arriver à regretter la réunion et ce directeur tellement plus prévenant que vous ne savez l'être. »

Les lois de Loïc Roche

Chaque homme et chaque femme, en fonction de son ancienneté et du nombre de personnes que compte son environnement professionnel, va développer un nombre précis de relations intimes sur son lieu de travail.

Premier principe : rien ne sert de courir avant la... énième
Il faut n rencontres pour qu'il puisse potentiellement exister entre deux personnes sur leur lieu de travail une relation à connotation intime.
Deuxième principe : plus on est placé haut, plus on séduit bas Il existe un lien étroit entre la position hiérarchique occupée et la capacité à « séduire »
. Troisième principe : organiser scientifiquement la confusion Il existe dans l'entreprise, la collectivité, l'Administration, une organisation « scientifique » de la confusion des genres entre la vie privée et la vie professionnelle.
Quatrième principe : pour gagner, il faut savoir se perdre Il existe un lien entre la capacité à innover des organisations et la capacité des hommes et des femmes à nouer des relations intimes sur leur lieu de travail.

> Ce que dit la psychologie : l'adulte erre en quête de dangers La psychologie renvoie tout d'abord à la question de l'infidélité. Contrairement à ce que nous pensons, la normalité devrait être l'infidélité et non la fidélité. La psychologie explique ensuite pourquoi le lieu de travail - parce qu'il propose de multiples dangers - va être perçu comme très séduisant pour celles et ceux qui vont y développer des relations intimes.

> Ce que dit la sociologie : un espace idéal qui va... du pareil au m'aime Le lieu de travail, dès lors qu'il est détourné par des hommes et des femmes pour y développer des relations intimes, se constitue comme un lieu tiers, idéal, à l'abri des contingences, des règles et des nécessités qui régissent la vie professionnelle et la vie privée proprement dite - à savoir en dehors du lieu de travail.
Besoin de réassurance

« [...] S'il faut être deux pour qu'une occurrence de rencontre puisse se solder par une relation intime sinon sexuelle, ce temps et cet espace hors du temps et de l'espace de travail proprement dit sont une occasion idéale. Il va suffire en effet de très peu. [...] Il n'est pas difficile d'imaginer que nous pouvons tous éprouver un jour le besoin de nous réassurer, je ne parle même pas du besoin éventuel (heureusement plus rare) de nous venger de notre conjoint ou de notre conjointe, ou tout simplement de nouer des contacts amicaux et plus seulement professionnels. L'autre - c'est-à-dire celui ou celle qui est là, et c'est nécessairement quelqu'un de notre entourage professionnel - se trouve alors présent au bon moment. Un autre qui se présente souvent sous son meilleur jour, son jour "professionnel". On connaît d'elle ou de lui surtout ses succès, il ou elle est toujours plutôt bien habillé, il ou elle fait attention à sa personne... Bref, je vois l'autre exactement comme je suis moi lorsque je suis au travail. [...]

« Quant à la connaissance que chacun peut avoir de la réceptivité éventuelle de l'autre, elle est régulièrement actualisée par ce que j'appelle les accélérateurs de relations intimes : les plaisanteries, le détournement des nouvelles technologies et même l'alcool. »
 

Un Gars Une Fille © 2008- Powered by: Fabrice Retailleau